mercredi 31 mars 2010

Dream - Kim Ki Duk


Adhérer au mouvement surréaliste peut paraître simple et pourtant s’y illustrer comme réalisateur et scénariste reste une tâche périlleuse. Kim Ki duk s’est révélé être un prosélyte du manifeste d’André Breton, conciliant harmonieusement le réel et l’irréel, le rationnel et l’intuitif… La primauté donnée à l’Amour permet de mettre scène tous les déraisonnements mentaux et affectifs liés aux relations humaines : l’onirisme plante le décor, l’esthétisme nous embarque dans un univers surréaliste, à la fois vide de sens et tapissé de symboles. Kim Ki Duk nous a habitués à ses films fantastiques où le basculement de la réalité à l’irréel se manifeste à un croisement de rue, où les événements improbables paraissent rationnels car totalement ancré dans la logique surréaliste. Après le magnifique Les Locataires, le cinéaste coréen a enchaîné les réalisations : l’Arc, Samaria, Time, Souffle puis Dream…Chaque film met en scène des relations amoureuses sans dialogues, totalement pulsionnelles, où l’image prévaut et les métaphores closent l’histoire. Et pourtant au fil du temps, les histoires qu’il nous conte perdent de leur magie. Ce rythme effréné l’a-t-il mis à bout de souffle, non d’inspiration mais de réalisation, de cohérence et de profondeur ?

Dream recycle les figures de style propres au réalisateur. Il nous transporte une fois de plus dans un drame poétique où les rêves obsessionnels d’un jeune homme se voient concrétisés par une jeune femme somnambule. Antithèses imagées récurrentes. Le noir et le blanc. Le rêve et la réalité. Le yin et le yang. Jin et Ran.
Les souvenirs remontent et provoquent des rêves funestes… Comment empêcher ce parallélisme onirique entre deux êtres antinomiques ? André Breton parlait de « Vases communicants » pour définir cette inversion et dédoublement des rôles ; Kim ki duk, lui, affectionne particulièrement ces intrigues. Nous voici donc emportés dans les méandres d’une dérive nocturne, les rêves défilent, les actions s’exécutent. Jin est persécuté par ses pensées obsessionnelles pour son ex- bien aimée, Ran quant à elle, se voit obligée de réaliser ces fantasmes destructeurs sur son détesté ex compagnon. L’Amour nostalgique et la Haine résignée se confrontent métaphoriquement. Quant au véritable Amour, le pur et libérateur, il trouve son incarnation en un papillon.

L’idée initiale aurait pu être spectaculaire, hélas la mise en scène indigente ne laisse qu’une vague impression de narration désordonnée et de scénario inachevé.
Dream s’enlise dans la répétition, il nous déconcerte et parvient à nous égarer. La brutalité qui émane de certaines scènes, oscillant entre automutilation et folie, sonne creux. L’esthétisme a supplanté l’intrigue, les personnages perdus frisent la caricature, la poésie s’est évaporée en un battement d’aile.

Ce dernier opus de Kim Ki Duk pose les limites d’un surréalisme mal maîtrisé et en perte de « cohérence ». Car même dans les univers fantasmagoriques, il y a des limites à ne pas franchir pour ne pas tomber dans le discrédit et faire voler en éclat tout l’onirisme du surréalisme.

Le papillon a finalement mal pris son envol…

2 Ponyo

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